Chaque mois j’écris un petit mot, « le mot de Martine ». Fruit de mes inspirations et de mes intuitions, mais aussi de mes recherches et connaissances, conférences ou lectures, il est adressé à toutes les personnes qui sont abonnées à ma newsletter. En ce mois de février, j’ai décidé de vous le partager à tous. Je vous en souhaite belle découverte !
Le mot de Martine : rencontre avec deux sages
3 février 2019, Matthieu Ricard le célèbre moine bouddhiste méditant et Alexandre Jollien le philosophe sont réunis pour une conférence d’exception autour de leur dernier livre , « A nous la liberté », écrit en commun avec leur ami psychiatre Christophe André (hélas porté absent en dernière minute). Dans cette belle salle chaleureuse du Théâtre du Léman, l’ambiance est détendue, sereine, presque conviviale tant notre philosophe à l’âme d’enfant est drôle, touchant, spontané et vrai, comme si son handicap l’avait affranchi de ce qui empêche d’être libre dans le cœur et dans la tête. Peut-être au fond le plus sage des trois…
Mais qu’est-ce donc que la liberté ? Le sujet est vaste et passionnant, et pour avoir élaboré un de mes mémoires en sophrologie sur ce thème, j’aurais mille (belles) choses à vous (ra)conter… Mais revenons à nos deux sages. Sans l’ombre d’un doute pour Matthieu Ricard, la liberté est quelque chose d’intérieur, « notre degré de liberté extérieure dépend de notre degré de liberté intérieure » explique t-il. « Le grand chantier de l’existence ! Et c’est un gros boulot », surenchérit avec humour Alexandre Jollien. Une réalisation qui demande patience et conscience, « un travail de libération et avant tout de soi », afin de se connecter au réel au-delà de nos projections et jugements, qu’ils viennent de nous-même ou du monde extérieur d’ailleurs, « car ils ne créent que des malentendus ». Pour cheminer vers la liberté, il est essentiel de se libérer de ses traumatismes : « descendre en soi vers une partie de soi indemne, comme un déménagement intérieur » poursuit A. Jollien. Et cet itinéraire est naturellement parsemé d’obstacles, qui pourtant si nous les repérons seront des moteurs et même des tremplins.
Le premier de ces obstacles est ce que notre philosophe assurément empli d’amour nomme « l’acrasie » : en d’autres mots « l’expérience de l’impuissance » vécue dans ces situations où notre raison n’est pas souveraine, où une part de nous, sans doute l’enfant blessé en nous, obéit à la loi de l’impulsion plutôt qu’à la voix du cœur ou de la raison.
Le deuxième obstacle est le fait du découragement, petite graine qui devenant grande cède sa place au renoncement.
Quant au manque de discernement, il nous conduit inexorablement à « tourner le dos à ce qui pourrait nous libérer de la souffrance ».
Enfin, parlons des émotions, et notamment de la peur, dont nous savons que neuf fois sur dix elle est irraisonnée et donc irraisonnable, qu’elle se nourrit d’elle-même créant ainsi une boucle infernale auto amplifiante qui fertilise le terreau de l’angoisse.
Seulement voilà, « la volonté ne peut pas tout » nous rappelle A. Jollien. Pour autant « le chemin vers la liberté est un chemin joyeux. A quoi sommes-nous ligotés qui nous empêche de sortir de la cage et de voler librement vers la vie ? » précise t-il encore.
Alors s’il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir, qu’est-ce qui peut donc nous aider à ressentir cette « simplicité heureuse », à progresser sur le chemin de ce sentiment intérieur profond qu’est la liberté ? La vraie question est sans doute dans la recherche de ce qui peut nous donner réellement confiance. Car pour notre grand penseur, « il n’y a pas de fatalité ». Pour mieux gérer les hauts et les bas de notre existence, nous avons tout à gagner à cultiver le calme intérieur et la clarté de l’esprit, car nous le savons tous, nous sommes les esclaves de nos fabrications mentales. Et aussi faire la paix avec nos émotions en apprenant à les traverser sans les renier, ou bien encore s’entourer de personnes bienveillantes et inspirantes qui sauront nous hisser vers le courage, la confiance et la joie de vivre. Il me reste à vous parler de l’importance de nourrir des « valeurs intrinsèques », tel que les nomme Matthieu Ricard, celles qui donnent du sens à notre vie, qui renforcent notre cœur et embellissent notre âme, tel le partage, l’amitié, le temps passé ensemble, la plénitude de l’instant, la contemplation, et non pas des valeurs qui nous enchaînent. Le bonheur peut être éphémère et nomade, s’évaporer dans la « stratosphère » ou nous suivre partout où nous allons parce qu’il sera inscrit au plus profond de nous-même… « Le chemin n’est certes pas facile, mais l’effort peut être joyeux » assure notre moine bouddhiste . Et comme dans nos entrainements sophrologiques, un pas après l’autre, c’est la répétition qui donnera à nos « efforts joyeux » non seulement la couleur et la saveur de la liberté, mais encore modifiera notre cerveau pour nous rendre meilleur durablement.
« Au début rien ne vient, au milieu rien ne reste, à la fin rien ne s’en va » nous enseigne Milarepa, grand maître du bouddhisme tibétain.
En souhaitant que ce partage vous ait intéressé. Avec cœur ! Martine